l’atelier du confinement

Fernando Pessoa, Fragments d’un voyage immobile, Rivages, 1990

Un homme peut, s’il est vraiment sage, jouir, sur une chaise, de tout le spectacle du monde, sans savoir lire, sans parler à personne, en n’utilisant que ses sens, à la condition que son âme ne soit jamais triste.

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Xavier de Maistre, Voyage autour de ma chambre, Flammarion, 2003

 En 1790, l’auteur, alors officier, est mis aux arrêts. Il commence la rédaction de ce Voyage autour de ma chambre qui sera publié cinq ans plus tard. En voici le second chapitre :

Je pourrais commencer l’éloge de mon voyage par dire qu’il ne m’a rien coûté ; cet article mérite attention. (…) D’ailleurs de quelle ressource cette manière de voyager n’est-elle pas pour les malades ? Ils n’auront point à craindre l’intempérie de l’air et des saisons. Pour les poltrons, ils seront à l’abri des voleurs ; ils ne rencontreront ni précipices ni fondrières. Des milliers de personnes qui avant moi n’avaient point osé, d’autres qui n’avaient pu, d’autres enfin qui n’avaient pas songé à voyager, vont s’y résoudre à mon exemple. (…) Courage donc, partons. (…) Que tous les malheureux, les malades et les ennuyés de l’univers me suivent ! Que tous les paresseux se lèvent en masse ! Quittez, croyez-moi, ces idées noires! (…) Daignez m’accompagner dans mon voyage ; nous marcherons à petites journées, en riant, le long du chemin, des voyageurs qui ont vu Rome et Paris ; – aucun obstacle ne pourra nous arrêter ; et, nous livrant gaiement à notre imagination, nous la suivrons partout où il lui plaira de nous conduire.